Vézénobres et le rond-point… (07 mars 2024 – 124 km)

 

Vézénobres, belle destination sous le soleil froid de l'hiver, qui réchauffe les cyclistes..
Crédit BL

Aller chercher le village de Vézénobres par des petites routes tranquille est relativement simple à conditions de rallonger un peu…Et comme la vitesse baisse avec les décennies, le kilométrage doit prendre le relais, rester constant, voire augmenter... Il n'a en tous les cas aucune raison de diminuer. Il suffit de se lever tôt. Ne pas être en avance mais être à l'heure. C'est possible. Ce n'est qu'une décision mentale.

L'avantage des anciens, c'est le mental.

Lorsqu'on arrive « en fin de carrière » ou au début d’une « ultime période créatrice », chaque village sur une Michelin 83 ou 80 est une destination de souvenirs.


Vézénobres perché sur son pog fascine. Il domine d’abord l’Alès des platitudes qui est d'évidence sous le niveau de la mer. Une espèce de baignoire de Gardonnenque, eu égard aux mines de Charbon et à d'autres choses. Et même quand tu es en sortie de galeries au pieds des terrils, l’inondation est le ticket pour quitter la noirceur physique et sociale. Que de tristesse pour ce charbon qui allait nous propulser vers les prophéties des mondes numériques. La digue bétonnée d’"Alès plage» ne protège plus du tout. On peut penser qu’elle est obsolète et mal-née. Moche c’est certain. Mais oublions Alès, dont j'ai déjà parlé dans une autre texte.

Parlons plutôt de la destination Vézenobres.

Le bourg domine et propose ce coup d’oeil sur les Cévennes à l’ouest. Aujourd’hui, en ce mois de mars, ce sera magnifique avec ces neiges récentes tombées sur le Lozère. Elles seront visibles dans le prolongement de la rue principale. Je les espère. La neige, cette eau « qui profite » à la terre par une redistribution lente.


Le vent est de face et de nord et un peu froid (je suis en long). Je m’amuse à penser, du côté de Canaules, que je file vers la Norvège doucement et à mon rythme et que j’ai vraiment le temps. Le temps on l’a pas, on le prend. Toujours cette attraction vers le pôle.  J'ai bien tenté d'avoir des projets vers l'Afrique mais pas bien longtemps. Un spasme hors de moi. J'en rigole.

C'était du temps des Inoxs avec ces courses en relais comme Paris-Gao-Dakar. Pédestre. Vous connaissez pas ? Confidentiel, dépassé. Pas conçue pour moi. 

Quand on est jeune, quand bien même en recherche d'espace,  courir dans les dunes sans eau (Il y a des pays où est marqué que chez eux il faut « éviter tout contact avec l'eau douce»), entre deux passages en douane compliqués et avec au final quelques risques d'une rafle de Polisario...n'est pas un projet. Très peu pour moi. C'est une anecdote. 


J’apprécie aujourd'hui cette extermination kilométrique, inexorable, presque sans retour sur les «routes presque belles» de la vie. Phrase que je pourrais indéfiniment écrire dès que je file en vélo vers une destination.

Le paysage défile, je sens le mouvement, cette liberté, cette possibilité d’aller loin… Anduze est par là bas sur la gauche entre les gros rochers, le Mt Bouquet pas très loin là juste en face, derrière cette colline. Vers le Nord quand même tout ça.

Vézenobres,  c’est également cette course en nocturne, la fameuse «corrida de la figues givrée» que j’ai réalisé plusieurs fois. Une course atypique de fin de samedi après-midi. Elle rejoint dans la série les courses dites «de Noël» avec la fameuse montée de la Pène et y ajoute la dimension féerique des frontales, des lampions, de la nuit. Un certain carnaval moyen-ageux. La traversée du village médiéval au milieu de lumignons posés sur les murs est un temps fort à déguster.

Je crois y avoir amené mes fils (Loïc 2007) afin qu’ils partagent un peu cette magie d’un Noël idéalisé, loin du contemporain, plus près des siècles de fondation.

M’y voilà rendu, ayant traversé après Massanes un Gardon qui a enfin retrouvé un débit. Je monte dans la cité tranquillement. Il y a là quelques restaurants que j’imagine cuisine d’époque, affairés à interdire le Burger qui est à la gastronomie ce qu’est le GPS au voyageur. Une Perte du corps et de l'esprit (orientation),  n’est pas mon projet. J'ai une pensée  pour les plus fragiles qui ont fait ces choix.

Crédit BL

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Pas de café ici mais ce n’est pas bien grave, je ne fais qu’une traversée dite «de respect» au milieu de la ruelle pavée centrale.


En descendant, direction Alès, je me risque à rencontrer Christian (C) qui ne sera pas chez lui. Christian dit «le Breton» , cycliste chevronné des brevets,Paris Brest et autres Diagonales. Toujours dans la pampa le mec malgré ses problèmes d'horloge ! Est-il de sortie avec Eddie (D), l’Irlandais qui habite aussi dans le coin ? Vont-ils tenter Le Mas de la Barque ? Avec la neige ce serait cool...

Je pense à ces deux compères de temps en temps. Comme à d’autres. Je mesure surtout chez eux leur capacité à gérer le naufrage de l'érosion naturelle , cette addition salée mais finalement bien méritée, au prorata des joies passées. Ils ont bien ripaillé sur la grande table de la vie. Pas de regrets.

Retour prévu par Lédignan. Un café allongé sera pris à l’auberge du Pont troué, cet endroit des nulle-part... J’adore les pontons de bois vous le savez, mais aussi les carrefours au milieu de rien et où pourtant on peut (doit) s’arrêter. Pour une pause éphémère dans un espace temps où il n’est pas encore temps de choisir. Tu t’assois (à cet endroit interdit au milieu des cinétiques, le rond point n’arrête même plus personne c'est son objet...) et il y a plein de route que tu peux envisager: Lédignan ? Anduze ? Alès ?Maruéjols ? Quelle est l'option choisie? Tu fais quoi ? Tu t’en fou et prend le temps. Je ne sais même plus si je vais rentrer par Lédignan désormais. Je ne sais plus si je vais rentrer. Pourquoi ne pas rester là et ne jamais rien choisir. C'est le principe. C’est le contraire de la pseudo-destinée des humains qui, arrivés aux rond-point de la vie (il y en aura peu), prennent une route sans s’arrêter et surtout sans savoir si c’est la bonne.

Très loin de là, en vélo cela représenterait des centaines de kms (en vélo on va loin), on réalise (souvent) qu’on s’est trompé de route. C'est grave. Et on se met à penser soudain à ce carrefour fondateur. On aurait du, à minima, s’arrêter ou...faire plusieurs fois le tour du rond point. Disons pour... gagner du temps. Et ensuite choisir.

Le pire c'est quand tu suis quelqu'un dans un rond-point et qu'il "se manche" et toi comme un idiot tu colle sa roue, alors que tu sais pertinemment que c'était la prochaine...

C’est pour ça que j’apprécie cet endroit du Pont Troué, comme j’aime aussi celui de «la Nouvelle» plus au sud vers Sommières, cette battisse isolée avec des routes qui descendent de tous les côtés comme pour mieux te piéger, laisses toi glisser la vie fera le reste! C'est cela. Bon voyage ! Et ne parlons pas de l’hôtel restaurant de «la ceinture» sur la route des Stes Marie de la mer…(voir l’impasse de Piémanson). Cas d’école. 

C’est dans des endroits comme ça ignorés des hommes et ne parlons pas des cyclistes (encore plus ignorés des hommes, clochards célestes identifiés), qu’il se passent des choses pour les naufragés.

Un arrêt à la station service du coin-des-Rebelles est toujours un bon moment. N'est-ce pas John Steinbeck ? J'aime bien Vézenobres.

!?!?!? 
Crédit BL.


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