Sara des Saintes... L' inutile destination ? (24 août 2022 – 164 Km)

 

Mon petit Bernard, si tu décides de remonter le temps, cela va être ta fête...
T'es où ? A l'Hotel Bar de la Ceinture ?
Bouges pas ! J'arrive...

Déjà en 1971, notre star nationale Johnny Hallyday chantait "ma jolie Sarah", une ode à toutes les victimes du temps qui passe. Nous aussi les cyclos sommes concernés, nous qui avançons sur l'axe, en adaptation permanente à cette usure, délabrement, effondrement, naufrage programmé depuis la naissance. Mais Sarah c'est bien plus que ça.


Ce matin, je vais partir vers les Saintes Maries de la mer, destination pas très confortable, je vous l'accorde, sur des routes encombrées au milieu des moustiques, des rats gondins, des vieilles bagnoles qui n'ont jamais fait de contrôles techniques car les gendarmes ne traînent pas trop dans ces marécages et autres banlieues des raseteurs, éleveurs cow boys, sans foi ni loi.

J'ai d'ailleurs toujours été intrigué quand PL, mon acolyte de la diagonale DP, m'envoyait parfois en hiver, des photos prises de la digue des Saintes. Des couchers de soleil avec peut-être un héron en arrière plan. Mais qu'allait il donc faire là bas ? Quelle signification ?

Était ce un pèlerinage vers cette Sara la noire, adulée des gitans ? Je doute. Il faudra que je creuse le sujet.


Moi, pour arranger les choses, je vais y aller en été. Peine augmentée avec les touristes, les voitures, la chaleur.


Sarah ou Sara, ce prénom est évocateur quand j'y pense et il revient souvent dans mes souvenirs. C'est un prénom du passé, de mon passé. C'est bien finalement que je dédie une petite journée vélo à Sarah même si je pense que ce sera la première et la dernière.


Dans les années 1990, les Inoxs, association de "malfaiteurs aventuriers" que j'avais crée avec un ami (JC) faisaient souvent référence à Sarah. C'était l'époque du film "Terminator" avec cette fameuse Sarah Connors qu'il fallait retrouver coûte que coûte, et pour nous, les droïdes étaient partout pour nous empêcher d'avancer vers une quête et peu importe laquelle.

Elle était le symbole d'un objectif original et difficile, d'une destination pas très claire, et de l'adversité qui se met en travers des routes, toutes les routes.


Sur les 100 km de Millau, par exemple, nous rigolions de ce coureur totalement inoffensif en apparence (un certain Georges Maillot, GM) qui, en retour de Sainte Afrique, à la solde des machines, nous aurait peut-être jeté dans le fossé, ni vu ni connu. Ah, le droïde Maillot croisé au compresseur de Tiergues (pour les connaisseurs) avec son vieux survêtement râpé ! Millau étant la destination finale pour retrouver Connors...Il y eu aussi ce Transcévenol hivernal avec le col de la Chavade, création matrixienne pour nous perdre.


J'avais même utilisé ce prénom pour un recueil de notes cyclo concernant une traversée préAlpine (1991). Déesse, alors mythologique, troublante aux 2 visages. L'un représentant la femme, l'autre l'aventure. Tous les deux inaccessibles et incompatibles, cela va de soi. JC en avait fait la préface.


Quelques années après JC a eu une fille qu'il a prénommé, "je vous le donne Emile" : Sarah !?

Étrange non ? Le plus étrange c'est qu' il voulait que j'en sois le parrain.


J'ai refusé illico. Pour moi, ce jeu de potaches des Inoxs sur la quête d'une Sarah, ne pouvait intégrer ou être dans la vraie vie, bien que la frontière ne soit pas nette. C'était trop dangereux et troublant.

Il m'en a voulu. Notre amitié s'est arrêté là. Je ne l'ai jamais revu. A-t-il été détruit par les machines ? C'est très dangereux d’héberger une Sarah. Le sait-il ?


Oui Sarah est une fiction, une quête mais il ne faut pas se perdre. Elle est par essence virtuelle et inaccessible, mythologique.


Tiens, ma marraine Suzanne qui vient de quitter ce monde, et que je n'ai jamais rencontré de ma vie sauf peut-être, à mon baptême, et vas savoir pourquoi, a appelé sa fille Sarah.


Dans ma prime jeunesse , j'envoyais donc des cartes à Noël ou j'embrassais Suzanne et Sarah sans les connaitre. Était-ce un monde parallèle ? Encore une Sarah. Inaccessible.


Oui et Sarah est-elle l'élue vraiment ? Qu'en savons nous ? Dans le film c'est le fils de Sarah plutôt. Celui qui va naître. 


C'est sur ces réflexions que je vais vers Lunel par des petites routes qui longe parfois l' autoroute, pour retrouver très vite la fameuse Tour Carbonnière, symbole de mon départ TDF 1990. J'avais quitté Michel Ray (MR) ici, il était en limite d'autonomie et ne voulait pas, à raison, se perdre vers ces platitudes.



Les lignes droites qui suivent mènent à d'autres souvenirs, des cheminements vers la côte d'Azur, vers un départ de Tour de Corse en 1983 avec un certain BB qui était très pertinent pour apprécier une quête comme celle d'une quelconque Sarah. Encore plus explosé que moi à ce niveau, mais moins lucide je pense.

Des souvenirs aussi de routes de nuit en voiture au petit matin pour rejoindre Salins de Giraud et son usine Solvay, laissant derrière moi une autre Sarah d'un monde encore plus parallèle.

l’hôtel Bar de la Ceinture, je me suis attablé pour un café. En 1993, épuisé de lassitude, j'y avais dormi une heure.

Je veux retrouver mon double quelques instants.

Le carrefour a un peu changé depuis cette "retraite de Russie" (abandon sur HM en Diagonale avec BG), j'essaie de reconnaître les lieux. Vous le savez le vélo est une machine à explorer le temps comme dans Terminator. Et ce n'est pas toujours bien. Nécessaire mais pas toujours bien et facile.

J'ai attendu 20 minutes. Personne ne m'a servi. Les serveuses derrière le bar me regardent furtivement et semblent chuchoter... Génial, prévisible ! J'ai senti le piège, il fallait partir sinon les droïdes des Machines auraient débarqué sur ce parking à l'abandon. J'entends déjà le bruit d'une Harley au loin sur le bout de droit de Sylvéréal.

Je me suis levé prestement, la Sainte, les Saintes m'attendent. Ne pas faillir et surtout ne plus être prisonnier du temps !

C'est sur ce genre de parking que l'on peut tout perdre encore...

La bac du sauvage reste un plaisir, je vais basculer dans l'autre monde, celui des gitans, de la bouvine, de Chomel et de mon passé à poursuivre cette Sarah qui parait-il m'attend dans une crypte en bas d'une église.

Bac du Sauvage... La porte vers la grande décision.
Un moment de répit sur "la route".

Me voilà à déambuler sur le parvis de l'édifice. L'ambiance est Mexicaine. J'en fais le tour, faisant celui qui n'est pas concerné. Des femmes me prennent le bras pour me dire l'avenir ? Quel piège à nouveau !? Etes vous réelles ? Voulez vous encore me distraire sur l'axe du temps comme cette Sarah ?


D'ailleurs je ne veux pas laisser mon vélo. Je sais que Sarah est à quinzaine de mètres mais je ne veux pas qu'on me le vole. Attention ! c'est ma seule possibilité de retour si j'échoue.

Tant pis, c'est trop dangereux, je ne ferai pas les derniers mètres vers Sarah. Je ne veux pas prendre le risque de perdre ce magnifique outil temporel qui me ramènera toujours vers "la vraie vie".

A quelques mètres près...
Sage décision.



J'ai décidé là sur le parvis d'abandonner Sarah, cette poupée fantoche qui, après tout, ne m'attend pas et me dirait que " ce n'est pas son histoire" et qu'elle ne croit pas à tous ces scénarios.


Bonne chance à toi Sarah des destinations improbables.

Heureux de ne t'avoir jamais trouvé.

Cette quête finalement n'a jamais été la mienne.

Je n'y suis pour rien.

C'est un peu dommage... Tu m'étais sympathique Bernard...
Enfin, si tu changes d'avis tu sais que ...



Un peu de musique...












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