David et le cycliste... (02 septembre 2025 – 227 km)
| Chuut... Tu ne vas rien sentir... Continues à pédaler doucement... David s'occupe de tout. |
Une belle journée commence, je vais la consacrer à quelques souvenirs et aussi à l'avenir, et à ce que mon intuition m'en dit.
Tout commence par la côte de Bel Air qui sera bientôt rendue aux cyclistes grâce à ce Lien qui va se brancher sur l'A75. La date de fin de travaux est encore indéterminée. Chez nous (France) tout s'accumule, il y a les écologistes à "libellules de Mosson", les recours de-ci de-là, les grèves, les budgets non débloqués, la lenteur du travailleur lambda de générations supposées désenchantées, les dégradations volontaires et involontaires, l'administration avec ses Cerfa en 8 exemplaires et le " mais vous n'y pensez pas !" (mon préféré)...
En Chine, ce fameux Lien qui part de Castries, on l'aurait construit en 2 ou 3 jours (au pire). Et, si nécessité d'état, avec seulement quelques frontales, on l'aurait commis intégralement en une nuit. Laissons la Chine de côté, vous avez raison, c'est un mauvais exemple pour tellement d'autres choses.
Ici, tout se calcule en décennies, j'étais à peine enfant que le Lien était déjà dans les projets des administrations (il y a donc plus de 50 ans) pour remplacer, entre autres, la ligne droite des Tourilles. Pour mémoire, l'aqueduc de Castries fut terminé en 3 ans (7 km). Nous étions en 1673...
Je pense que cette côte de Bel Air, dangereuse par la promiscuité des voitures (qui bouchonnaient à St Paul et Valmalle), je pourrais enfin la vivre seul, sans ces migrations véhiculées qui, dès potron-minet, vont au Polygone faire du shopping (on ne travaille pas à Montpellier, cela se saurait).
Me voilà maintenant sur ces lignes droites parallèles à l'A75 (qui va escalader le Pas de l'Escalette). J'aime beaucoup aller à Lodève, c'est un sentiment récent, même si l'endroit est un peu maudit. Cela va très vite, une trajectoire rentable vers l'ouest et puis, je l'ai écrit quelque part, ce village, pourrait, c'est mon avis : avoir une seconde chance.
Mon but maintenant est de monter le col de la Baraque de Brâl. Le 03 avril 1982, précisément, je passais pour la première fois cette petite bosse par le sud lors d'un Brevet Fédéral de 150 km organisé par le CTM de Montpellier. J'étais alors avec un certain Robert Filhol. Qu'est-il devenu ? Il devrait avoir, d'après mes archives, 86 ans. Un âge respectable au-dessus de l'espérance de vie. Et n'allez pas me dire que le vélo conserve. Tu gardes la ligne certes, mais tu y passes comme les autres. J'ai des exemples. Avec moins de regrets peut-être, car "tu as tout bien fait comme il faut..."En vain.
Est-il toujours vivant ? Pense-t-il parfois à moi comme moi, je pense à lui de façon très ponctuelle ici ? Les cyclos se croisent et la caravane passe... Je me demande s'il n'était pas chimiste... Etre chimiste a toujours un côté intrigant, presque sympathique... On dit : "c'est le chimiste de la bande". "Robert dit "le chimiste"..." Il y en a quelques-uns de chimistes dans le milieu cycliste et j'en fais partie (PhD quand même). Je vous inquiète ? Cela me fait plaisir. Le Heisenberg de St Mathieu.
Bref une petite remontée dans le temps... Passer à Lodève déjà te pousse à fleurir les tombes des Cathares et autres premiers pèlerins, j'y trouve même "un château de ma mère", je suis donc bien sur le bon chemin... Ces bâtisses à grilles cadenassées, sont des balises sur le chemin des souvenirs.
L'arrivée au sommet est décevante. Exit le panneau en pierre de taille qui symbolise le passage, il est remplacé par une babiole éco-équitable, recyclable, très colorée popset, genre pubs agités sur la ligne du tour de France. Ne vous y méprenez pas, elle "coûte un bras" aux contribuables. On a surtout envie de la taguer et je comprends les jeunes que cela interpelle. Tout ce qui n'est pas construit dans un but d'immortalité doit être souillé puis disparaître. La destination de l'éphémère dans le texte.
A droite maintenant pour "la quille" (sans le détour) et le "dôme de Mulder" (radar géant) qui mène cette fois aux environs du Perthus. Roqueredonde est toujours aussi agricole, la chaussée n'y est jamais très nette, plutôt crottée et c'est surtout l'odeur de lisier qui t'indique l'entrée du village. Lors du dernier BRM 400 (2023) d'Assas and co., la bande " à la dérive " des cyclos "de fonds de puits" (lanternes rouges) avait failli s'y perdre.
L'Escandorgue est un petit plateau singulier sur lequel on ne reste pas longtemps. Il est aussi la frontière avec d'autres mondes comme l'Aveyron et plus loin le Réquista du 3eme type que j'ai déjà chanté ailleurs. Il est comme une porte de Cévennes, mais sans les Cévennes. On y trouve des temples tibétains, des clochettes et carillons, des nanas bariolées plutôt fluettes (au RSA) qui veulent, à l'occasion, au milieu de chiens fous, envoûter le passant à carte bleue qui chercherait un bar. Ici, en l'occurrence, c'est Lerab Ling, temple bouddhiste tibétain, qui est dans l'aire d'attraction de l'Escandorgue.
Je continue pour Ceilhes où je vais manger mon sandwich acheté à St André de Sangonis. Un café ensuite à l'épicerie multiprise. Une discussion s'engage avec les jeunes qui gèrent le bazar de bord de rivière. Les touristes sont partis. Cela pourrait être mes fils. Je m'attarde... Je m'y attache même. Que faites-vous là les jeunes !? Avez-vous des projets lumineux ? Des choses palpables à ruminer plus tard dans la tombe ? Des rêves fous ?
Continuons la route " à l'envers" pour passer les thermes d'Avène les Bains et rejoindre le bref verrou pentu de la Tour-sur-Orb qui mène à Gressesac sans passer par la case Bédarieux.
J'arrive à Villemagne l'Argentière un " bled" que personne ne peut calculer sauf moi et quelques amoureux de la musique des années 70.
L'an dernier, nous étions allé assister au concert de Murray Head. Un grand moment de musique et d'émotion, car lorsque tu participes à ce genre de prestation, tu es traversé par des notes qui convoquent des souvenirs passés et tu sais aussi que c'est certainement pour la dernière fois, et que tout ça va disparaître... Ce sera attendu mais brutal.
Tu es heureux d'avoir pu capter les derniers instants avant que la trappe ne s'ouvre. Un privilège à ne pas négliger...
| Say it Ain't so joe... |
J'ai déjà parlé de Murray Head dans ce blog puisque je l'avais "rencontré" au café du Jardin à Valleraugue en retour d'une belle virée 4000 marches (15 octobre 2023). Il était là assis avec quelques amis que je pensais d'ailleurs être ses musiciens. Je vais y revenir.
Pour l'instant, après un tour du village, je devrai dire une déambulation autour des quelques maisons qui le composent, je retrouve le champ désormais désert où était édifiée la scène éphémère du concert. Un magnifique de néant.
Il n'y a plus rien, plus la moindre trace. Je le savais, c'était dans le contrat. La trappe s'invite plus vite en sortie de festival. Ces manifestations vont et viennent au milieu de ballots de pailles, le temps de quelques étoiles filantes sous les nuits magiques d'un mois d’août. C'est mon retour à Villemagne. On remercie le lieu de nous avoir laissé lui dire " au revoir" à ce Murray. Merci pour cette gentillesse, ces musiques, ces rencontres, et puis aussi pour ces huîtres dégustées (on reste pas loin de la mer) au pied de remparts médiévaux.
| Une prairie...encore et toujours... Symbole de ce qui fut et sera. |
J'étais avec Filhol ce matin et je retrouve ce champ l'après-midi. Il m'amène donc à boucler cette rencontre avec Murray à Valleraugue.
J'étais retourné au café du Jardin (10 jours plus tard donc le 25 octobre), lieu que l'on pourrait baptiser, à le croire, "jardin de la rencontre" ou de "la rencontre espérée, désirée", ou de "la non-rencontre"... Pour des vérifications.
Il faut vérifier ses sources. L'homme est un puit de doute. Etais-ce vraiment toi Murray Head ?
J'avais trahi Murray une fois dans ce jardin de Valleraugue en faignant l'ignorance et je voulais me rattraper... A-t-on une seconde chance ?
Et là, on (la patronne) m'a expliqué en rigolant alors que je montrais la photo prise à la sauvette pour débuter une religion, que ce n'était pas du tout Murray Head, mais simplement David ! Un garnement du village...
Quelle méprise ! Non. J'en étais presque soulagé. Passer si près et n'avoir pas été à la hauteur aurait été bien pire sur l'échelle des valises.
David est quand même un nom ou un prénom qui interpelle l'humanité et surtout en ce moment. Pour moi il est corrélé au sentiment de trahison.
Pour creuser un peu, il faut se souvenir que Murray Head avait déjà chanté sur l'album de musique "Jésus Christ Super Star"... Il était alors Judas d'Iscariote le traître.
Jesus n'est-il pas le fils de David ? Murray avait donc trahi Jésus et donc David... Pour info les passionnés, Jésus, c'était Ian Gillan le chanteur de Deep Purple... Pas moins.
Murray Head trahissant le descendant de David en 1970, et moi trahissant le David du village en 2023 en l'ayant confondu avec le Judas de 1970 !?
Ce qui me fait réfléchir à tous ces David qui croisent souvent mes routes qu'elles soient réelles ou imaginaires...
Je reviens pour fermer le dossier. Les histoires de David sont résolues et pas si compliquées. Je n'en parle plus.
Je mérite un bon goûter à Bédarieux, un nouveau concept Blachère (pas cher) m'attend à l'entrée de la ville...
Ensuite, ce sera la bosse de Carlenças. Les bornes défilent, vais-je passer les 200 aujourd'hui ? On dirait bien. Mas Nouguier. Mon esprit divague encore...
Pour finir, David n'est-il pas aussi le prénom donné à l'androïde de Alien Covenant dans le film de Ridley Scott ?
David de la mythologie, David et Murray Head, David à Valleraugue, David l'androïde... Des histoires compliquées qui semblent avoir un lien entre elles et tourner en boucle.
Maintenant, si on met tout cela sur un axe temporel, l'évolution des David risque de poser problème...
Dans Jésus Christ Superstar Murray Head alias Judas Iscariote, trahi le fils de David (dit Ian Gillan de Montreux).
Au jardin de Valleraugue, je trahi David, sosie de Murray faisant mine plusieurs fois de ne pas le connaître...
Une personne qui se fait passer pour David, il est premier prototype jugé efficace des androïdes à venir...
Le David dans Alien Covenant de Ridley Scott qui est la dernière évolution du bazar et va trahir l'humanité. C'est simple. Le gitan Melquiades a du d'ailleurs l'écrire sur un parchemin...
Pédalons encore sans souffrance, bien naïfs vers les temps nouveaux... Ayons confiance en l'avenir.