Béziers... Mais où est la piste pour que le monde s'écrase joyeusement.. ? (05 avril 2022 - 206 km)

 

J'ai travaillé toute ma vie pour prouver, en mécanique des fluides, que le vol était possible...
Le crash aussi, mais il s'agit d'une conséquence malheureuse...
Ma rue est peut-être finalement un lieu atterrissage définitif. A réfléchir.
Paul Painlevé

Finalement, moi le brillant organiste, j'aurai échoué dans les arènes 
de Béziers, à deux pas de ce qui deviendra un terrain d'aviation abandonné avec une carlingue d'avion. C'est étrange ce que la vie nous réserve parfois.
Camille Saint Saëns 

Il a fait froid ce matin (3°C), une conséquence implacable du réchauffement climatique global qui implique d'abord la variabilité.

Le but aujourd'hui est d'aller virer à Béziers, une destination encore étrange et à plusieurs titres. Depuis le "sac de Béziers" (1209) la ville a (à peine) évolué et se trouve bien loin de l'idée du Catharisme, c'est le moins que l'on puisse dire. Oui, ville abandonnée (par ses élus) depuis si longtemps, comme ses vignes qui l'entourent, vendues au plus offrant, pour adoucir la dépression des soldats.


Je m'y suis toujours senti mal à l'aise. Toujours. Mes traversées du centre ville en voiture et en vélo ont toujours augmenté cette sensation de nulle part ou d'un ailleurs non choisi, d'une époque révolue, sans espoir.

Il y a cette remontée de la gare, ce centre étrange et d'une autre géographie comme un pont de porte avion abandonné, puis une ligne droite qui te promet une respiration là-bas, vers le nord... Il faut en sortir.

Le 06 août 2016, lors d'un Strasbourg Perpignan, je m'étais déjà perdu pour récupérer Béziers. Et quand on a décidé d'aller à Béziers, ce qui est un "non choix cycliste", la ville te perd très tôt en amont du coté des St Pons de Mauchiens, ou autre Vendémian, où le Christ s'est arrêté au panneau, ayant peur de la crucifiction de l'ennui et de l'immobilité.

Je me souviens d'avoir récupéré, épuisé mentalement Valros. Déjà le bitume se détériorait, la route n'était plus balayé, te proposant le risque de la multi-crevaison...Le soleil devenait plus jaune, plus chaud, un air plus irrespirable. Un peu comme lorsque tu es en approche d'Alicante en Espagne, pour ceux qui connaissent. Et tout ça même au delà vers Narbonne qui lui sera sauvé par les courants d'air d'un vent loyal et constant. Un sud donc, sans ménage, sur un asphalte de Tanger, limite terre battue... J'avais encore pesté sur ma bécane du côté du Zinga Zanga. Heureusement le vent d'ouest était venu apaiser le diagonaliste qui est libre.

Pour aller à Béziers il faut trouver le verrou d'entrée. On oubliera donc cette directissime en bordure d'A75 encombrée de détritus qui te mène aux échangeurs.

Pour moi ce sera un Castelnau de Guers puis une flânerie (relative) en bord d'Hérault rive gauche pour retrouver la fameuse route de Bessan. Comme rien ne sera fait comme il faut, un fort vent d'ouest va me ralentir. Mais cette fois je saurai en profiter au retour. Oui là aussi il est plus facile de quitter la ville que d'y rentrer.



Me voilà dans les faubourgs il est pas loin de midi. J'évite les pistes cyclables qui ne ressemblent à rien. Le scandale des pistes cyclables conçues pour déculpabiliser et te faire croire...


En 1970 mes parents nous avaient installé rue Paul Painlevé près du lycée Jean Moulin. J'ai quelques souvenirs assez précis, notamment la mort de Charles De Gaulle. J'ai senti que c'était grave.

Me voilà devant la maison que mes parents louaient et où nous étions. Elle a bien changé, agrandie par une véranda sur le jardin, c'est devenu un resto tacos burger. Elle est tenue par quelques épiciers qui vont à ma rencontre dès que je prend quelques photos, certainement pour revendiquer le droit à l'image où pour quelques autres idées. L'accès à la mal bouffe immédiat.

Les épiciers de la malbouffe ont investi le lieu...
Evolution normale d'ouverture sur le Monde... 

Pour aller au bout de mon idée, et faire ami ami (comme sur face book) je commande au drive un "Américain Coca"...  

Cette rue Paul Painlevé symbolise pour moi les premiers souvenirs d'un crash. Celui de mon père. Je partage ce souvenir. Pilote de chasse, moniteur à la patrouille de France, il s'est retrouvé là, après l'autre chantier celui de la Sorbonne, y a perdu ses économies avec un escroc. Et il n'a jamais refait surface. Perdu à jamais dans ses souvenirs d'Amérique, comme Labro... Oui cette rue c'est le symbole de cette piste qui accueille un avion posé sur le ventre. Le lieu d'un crash.


C'est bien d'y retourner. Tout ça c'est vieux et bien fini et mon café blog, vous avez raison, mérite mieux. Je vais d'ailleurs le prendre devant les arènes à deux pas face à la statue de Camille Saint Saëns. Organiste lui aussi un peu comme mon père.

Juste face au buste de l'organiste...
Les arènes.

C'est intéressant cette rue Paul Painlevé et parfois troublant. C'est une endroit qui a été choisi inconsciemment. Où est- ce l'endroit qui vous a choisi ?

Je ne m'attarde pas. Le souffle de l'ouest qui est une destination plutôt vers le nord nord-est va me propulser vers cet avenir obligatoire et beau.

Les bandes blanches défilent sur la route de Bessan, cela semble facile, la cinétique est un joie physique indéfinissable.

A la faveur d'une bascule, mon vélo prend vraiment de la vitesse, sans effort. "Rotate", je décolle... Quel chance j'ai de pouvoir voler et quitter ce lieu.


1970 - Papa Lima tango Charlie se pose,  route de Bessan, pour arrêter
son avion rue Paul Painlevé. Le train atterrissage n'est pas sorti.
Et pourquoi faire ? On ne redécollera plus. C'est Béziers.






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