L'inévitable rencontre... ( 19 juin 2021 - 252 km )

 

Tu as les idées fixes ? Moi aussi... (TSL48)




Bien belle journée qui commence par le suivi du "petit train Bleu " du club ACE qui démarre à 6h à quelques hectomètres de ma maison. Je m'incruste au groupe (préinscription la veille), c'est une compétence, ils vont me propulser sur ma journée test.

On commence par un record :  38 minutes pour atteindre le sommet de la Cardonille. Cela implique de monter le Ft Béthou à plus de 20 à l'heure et " à froid". L'objectif est ailleurs je le sais, mais je suis joueur.

Oui, journée test sur la distance, pas la vitesse uniquement les kilomètres. Il faut sortir d'un marasme global, d'un poly -effondrement depuis le dernier Paris Brest Paris au demeurant fort bien négocié par moi et sans être prétentieux. C'était la dernière flamboyance... Cela commence à dater.

Mes acolytes, disciples de Lapuyade (amateur) et autre Cavanna (pro) amènent de gros braquets et il faut, c'est insolite, ralentir pour ne pas arriver en avance à Ganges au fameux rendez vous des tuniques bleues. J'en ai presque envie de rire. Une heure de St Math à la porte des Cévennes.

 

Ganges est un départ et je vous ai déjà expliqué que ce n'était pas une destination. Là, Gérald, Serge,  Yannick et quelques autres... mais des chevronnés quand même, me proposent un deuxième étage pour arriver nickel au bas du Minier via un petit col qui descend sur le Vigan. On allait pas faire direct quand même. Et qui connait le col des Aires ?

Le col du Minier c'est un peu de patience. Je ne vais pas en découdre, c'est trop tôt, j'ai encore des relents de couvre feu et autres confinements dans les pattes... Je dois réfléchir. Le deuxième étage se détache. N'allez surtout pas croire que je ne peux pas suivre et que je ne les reverrai pas... Virage d'Arphy, la Cravate et le brouillard s'abat, dense, mais sans véritable précipitations. Je suis régulier devant Puechagut et ses curés disparus, ces derniers dévorés par l'oubli, la pyramide des âges, par les Cévennes ou la plaine ou les deux. L'essentiel est qu'ils ne soient plus là mais ils ont existé, j'en atteste et vous en ai déjà parlé recemment...

Alors que l'Espérou se profile, je vois une apparition au loin... il est du club, une tache bleue. Certainement le premier abandon. Il y a toujours du déchet lors d'une sortie. Il bascule sur Valleraugue, il ne m'a pas vu arriver avec la brume...Peut-être a t-il honte de me parler. Sa descente de remords commence.Moi, j'arrive rapidement à l'observatoire par la route sud désormais interdite aux voiture.

Je m'installe au café qui est ouvert avec la grande salle vide... Après quelques minutes devinez qui arrive ? Et bien quelques membres du  club qui se sont employés pour arriver là, chacun faisant une affaire personnelle de cette petite histoire.


Le deuxième étage de la fusée pour la rencontre TSL48...
Les 7 modules sont  récupérables à Ganges après un atterrissage vertical...


L'étonnement, à mon grand étonnement,  est sur leur visage. Et oui je n'ai pas fait le détour par Faubel... Mais quand même. N'oubliez jamais, chers Gérald et associés, que sur les 600 BRM j'arrive souvent avant vous . Pourquoi ? Et bien parce que vous perdez du temps quelques part. Réfléchissez. J'étais encore à vos trousses sur PBP...  Je pense que ce n'est pas physique, bien que vous déclinez ,c'est avéré, c'est surtout  mental pour vous. Le vainqueur de Paris Brest, tu lui enlèves son organisation, ses repères et son suivi et il finit aux limites des 90 heures, errant d'épiceries en bars, à la recherche de soutiens, cherchant à lever une armée de cyclistes de camping pour l'abriter et le guider.

Voilà je vous quitte, je vais tester la bête sur ce qui ressemble à une " classique Cévenole", du bornage et un peu de dénivelé. Je suis désormais sans repères, dans l'espace. Le club, quand à lui, revient à Montauban (Ganges) sous l'oeil du logiciel Strava intercommunal.  A une autre époque, pour mes compères,  j'aurai parlé de haute mer et de mouettes condamnés à revenir vers Ganges, faute de noyade assurée et d'ailes fragilisées... Cabrillac, Perjueret, arrêt devant la stèle de Rivière et puis Florac pour le repas de midi sur un banc, place centrale. Comment ne pas penser à cet opus Clio de l'an dernier ?

Très joli Florac...



En sortant de la ville, je croise Thierry St Léger, alias TSL 48. Croiser TSL 48 c'est un peu comme apercevoir un lynx sur les hauteurs du Jura ou un ours à proximité du Carlit... C'est rare. Bon en même temps j'évolue sur son territoire. Thierry c'est un beau personnage avec des convictions. Il fait tout sur pignon fixe à l'ancienne. Le dérailleur n'existe toujours pas pour lui ou bien n'existe plus. Il chevauche donc un Fixie et rien ne l'arrête. Je ne vais pas faire sa promotion, il a ses adeptes et ses détracteurs, disons que moi,  je suis au milieu. C'est spécial. Je le trouve courageux. Un brin fêlé quand même mais nous avons tous nos fêlures et cela lui donne un certain charme. Au moins il a une direction ce qui peut donner du sens.

On s'est croisé souvent, depuis 1999, sur les BRM préparatoires au jeux Olympiques de fin août sur  terrains Bretons. Ca a été pour moi  l'occasion de voir qu'un pignon fixe bien mené c'est très performant. Rencontres , bien sûr aux départs des qualificatifs mais  surtout  au milieu de la nuit ou en fin de nuit " en dérive"... TSL va au bout de lui même. Ce qui me rappelle ce "600" de 2011 qui nous a proposé la rencontre des " fantômes  de Requista"... Je crois que c'est à Cornus au petit matin, où après  2 nuits les cyclistes errent forcément dans les limbes de la fatigue et des hallucinations, que j'ai trouvé TSL couché sur une table, presque inanimé, mort. Il a fallu sauver le soldat TSL et le ramener " à la maison"... Le soleil se levant, il a su que nous étions encore vivant, qu'il fallait vivre et que c'était même le but. Pourquoi mourir si on ne peut pas témoigner ensuite de l'impensable singularité ? J'ai souvenir de quelques heures passées ensemble pour un accostage à Jacou. Cela créait quelque chose, un lien. Parfois c'est plus fort qu'une année passé auprès d'un collègue de bureau totalement transparent, dégoulinant sur sa chaise,  au regard de Saurien. On s'est retrouvé quelques fois encore avec Thierry, mais toujours sur un champ de bataille, jamais ailleurs dans aucun état major ( on dira minor). C'est précis, net, brutal, constructif.

Nous parlons un peu avant qu'il ne rentre chez lui dans un bled que j'ai du traverser tout à l'heure. On se dit le plaisir de se retrouver. C'est vrai, je pense qu'il est vrai qu'un ancien compagnon de guerre, croisé sous les tirs ennemis, peut devenir un ami jusqu'à la mort. L'amitié se forge et se créait  dans un espace temps violent. Et pas ailleurs. Même si c'est décevant parce que rare.

La mièvrerie des petits sorties dominicales où l'on chante à 20 à l'heure, par météo favorable,  au milieu des cul de jatte et autres prétendus opérés du cœur, ne créait pas de véritable amitié... Au pire seulement une camaraderie équivalente à celle des réseaux sociaux. Le néant de la solitude.

Tu vois TSL, aujourd'hui je reprend un peu la longue distance. Notre rencontre n'est peut-être pas le fait du hasard ?    Et si on le décidait ?

 Jalcreste ( où l'eau est à vendre) et on glisse sur Alès, cela fera une belle tirée. St Jean du Pin, Anduze (braquage en règle) et le vent dans est la gueule, ce qui provoque en moi une joie enfantine.  Vacquières, la petite route de château Laroque. Les reflexes sont bons, voyons la suite.

 Et finalement peut-être à bientôt TSL ??? Le test est positif. Peut-être ne suis je pas encore vacciné contre la longue distance ?


 

Thierry St Léger avec BL34 devant le Causse...


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