"Rata le magnifique..."
"Le
grand hommage au grand Rata..."
Est venu pour moi le temps de te rendre hommage mon cher Jean Pierre
Ratabouil alias "Rata". Je ne
le fais pas vraiment par plaisir, c'est pour l'histoire et puis, je n'ai rien à faire
ce soir. Je vais être direct et dire qui
était "Rata le magnifique" pour ceux qui ne l'ont pas connu vraiment.
J'ai bien lu les hommages " qu'il était bon, qu'il était gentil ", je vais
faire un peu différent, n'étant à la solde que de la vérité.
Non je ne vais décliner ton palmarès cela pourrait te faire
de la publicité et nous sommes toujours, il parait, en compétition même si tu es dans
l'autre monde. Les hommes sont en compétition entre eux éternellement, avant,
pendant et après... C'est un peu triste je sais mais, c'est comme ça. C'est
génétique, rapport à la survie dans un monde fini...
Tu es décédé "hors délai". Pour toi qui
gérait les Diagonales avec une science du chronomètre d'origine divine c'est un
comble!? D'ailleurs tu es hors délai
dans le sens inverse puisque tu es arrivé au Paradis trop tôt. Tu vois qu'il ne
sert à rien de se presser ... Comme à ce Dunkerque Perpignan fondateur de
névroses (pour certains) où tu nous suppliais d'aller toujours plus vite car un
ou une apôtre quelconque nous attendait
en bas de la carte et il fallait, "en finir"... Pourquoi aller plus
vite ? A Paris Brest c'est utile puisqu'au dîner de cons on passe devant certains
marathoniens pour les humilier mais une diagonale c'est quoi ? Je pense pour ma part qu'elles ont
été conçus pour "mourir sur un délai" et pas avant ni après et c'est
bien là la difficulté . Comme approcher une boule du cochonnet... Du grand art.
Bon là cette fois-ci tu n'as pas choisi, ma comparaison est un peu choquante...Mais bon.
Bon là cette fois-ci tu n'as pas choisi, ma comparaison est un peu choquante...Mais bon.
Oui Rata tu étais discipliné,
et c'est une composante majeure de
l'amour qu'avaient pour toi tes acolytes
et compagnons de route. Ils étaient aspirés par la règle, l'ordre, le sifflet, il
fallait suivre le capitaine de route... Quel confort dans ta roue, ne pas
penser, surtout ne pas penser dans le froid sidéral de l'épreuve... suivre le
tribun, l'officier de quart... C'est très bien surtout lorsque tu es dans le
dur... Tu étais un phare... Ceux qui t'ont quitté ou que tu as quitté, soyons
plus honnête,...ont tous eu un "coup de moue" ensuite, échouant sur
des diagonales faciles, n'ayant jamais été eux mêmes autonomes dans les
décisions, n'étant pas formés à errer dans les limbes de la longue distance,
n'ayant eu que des ordres à exécuter sans le moindre pourquoi. Pour ma part
j'étais plus enclin à l'indiscipline, à la bohème, à la poésie, pourquoi
pas à la création d'erreurs volontaires, pour mieux les résoudre... Nous étions différents.
Adepte de l'absurde et des enchaînements tu
étais. Pour preuve ces fameux "triangles" contre vents et marées où, finalement, on faisait du sur place pour revenir au même endroit sur la carte de
France. Avec cette joie de n'avoir utilisé ni voiture ni train. Il fallait aussi
en finir avec ces diagonales, alors par 3 c'était vraiment rentable... Une
logique comptable qui méritait l'éloge de l'ordre des commissaires aux comptes.
D'ailleurs tu n'as pas prolongé ensuite... Fini de jouer.
Cette logique tu la chérissais aussi pour doubler les Brevets et pourquoi
pas un le samedi et, un autre, le lendemain. Nous étions dans
l'optimisation quantitative...Le grand sigma.
Pour ma part c'était plutôt l'absence de qualitatif qui me
faisait refuser les "bornages" inutiles...
Tu étais d'ailleurs souvent, le lundi, fatigué, sans compression, ayant fini dans les délais certes mais sans compression, ... Incapable de ces fulgurances "bêtes" qui nous rendent touchants, brillants, fragiles et oui... insolents...
Tu étais d'ailleurs souvent, le lundi, fatigué, sans compression, ayant fini dans les délais certes mais sans compression, ... Incapable de ces fulgurances "bêtes" qui nous rendent touchants, brillants, fragiles et oui... insolents...
Tu faisais des tours Eiffel avec des cols en allumettes, il fallait toujours en rajouter... Combien en a tu comptabilisé... ? Ton bilan
carbone était étrange à ce sujet... Se rendre au pied d'un col muletier en
voiture... Chercher un col inexistant dans le fond d'une basse cour sous l’œil effaré de la fermière... Supposer
un col homologable sur un pont d'autoroute.!? Tu avais là rejoins les membres de ton
réseau... les fameux "sacochards CGC colisés" (on parle d'ordre) qui vont à Pâques en Provence et dont la
jouissance consiste en l'inauguration d'un passage qui n'existe pas (cf. col du
Débat dans ce blog), échelle de pompier seulement due à un hasard de la tectonique, de l'érosion, du cantonnier... Étrange. Tu ne parlais
jamais de tes cols, d'abord parce qu'il y en avait trop et puis qu'ils n'avaient
aucune importance, ils étaient escaladé,
numérotés et aussitôt remisés, oubliés... Il fallait surtout ne pas y revenir... "Ça sert à
rien..." On s'en étais un peu "débarrassé..." Il fallait jeter le contenu de
la malle au fond du fleuve, reniant l'avoir remplie au préalable...
Tes amis cyclos disparaissaient les uns après les autres. Je
n'ai jamais su pourquoi, les Pierrot, Gilbert, Serge, Victor et bien d'autres étaient brutalement absents... Par
lassitude ? Épuisement ? Ou d'autres raisons plus obscures certainement. Je ne vais pas
parler à leur place ... Pourtant tu roulais toujours en groupe !? Par quel tour
de magie ? Moi aussi j'en ai épuisé
quelques uns mais c'est parce que je suis solitaire donc c'est très normal.
Mais pour quelqu'un qui, comme toi, prônait le collectif permanent et sans cesse revisité, pour moi ce fut une énigme...
Tes organisations étaient impeccables, tous les survivants
que j'ai interrogé en conviennent... Trop impeccables ? Un rail, un tunnel qui ne supposait pas beaucoup
d'improvisation alors que le temps, la vie voulait modifier les choses ? C'est vrai que
tu pouvais nier d'un seul coup d'un seul, l'existence de la pluie et de la
tempête alors que tes matelots étaient rincés, tremblants, frigorifiés jusqu'aux
os... "Nul n'est censé ignorer la réalité". Sauf toi. On ne dit pas que quelque
chose n'existe pas, on dit on va lutter contre cette chose qui existe... C'est différent. Cela
peut prêter à confusion et pousser certains, d'une (autre) sensibilité, à
quitter le navire...
Tu rallongeais les parcours quitte à provoquer et être, disons-le, ridicule, voire choquant... On provoque toujours quand on montre à celui qui fait un parcours
avec nous qu'on a déjà fait 100 bornes avant. Ce n'est pas très sympa. Je l'ai
fait aussi et j'y pense à chaque fois et je dis que cela m'est nécessaire pour un projet, me comparant à Roger Devlaeminck qui se surentraînait ponctuellement, avec succès d'ailleurs. C'était ridicule. Quelque fois de rallonger permet aussi de
pallier à une déficience du parcours officiel mais c'est quand même excessivement rare.
Et c'est pire quand on se rend à un brevet kilométrique en
vélo... On fait un 350 pour un brevet audax de 200 ! C'est absurde. C'est qu'on
s'est trompé de brevet tout simplement... Il fallait s'inscrire à un brevet de
350 (200 +150). Qu'en on pensé tes compagnons de route ? C'est vrai ne pas penser...
Tu avais une autonomie en victuailles diverses et variées
qui t'obligeait à t'alourdir (comme néné cassoulet, cyclo bien connu en terres nord de Montferrier). Peut-être pour ne pas
stresser et "être autonome". Moi j'ai toujours choisi de dévaliser les
commerçants locaux. Pour les rencontrer et les faire vivre et finalement, et rester
léger sur les routes... La légèreté ce n'est pas la "Ratagravité" si
je puis me permettre...
Ton aptitude à côtoyer les cadres fédérés (aux cheveux
blancs) et à être en phase avec eux et leurs nouveaux règlements m'a toujours scotché.
Ils allaient vers toi spontanément, comme attirés par tes trémolos vocaux travaillés sur la musique "Etoile des neiges"... Vous étiez une grande famille, la famille
des bénévoles qui maîtrisent le système, ces prolongement des réunions dans les
entreprises voir les administrations..."Le grand câlin régulier des réseaux". Ces rencontres numérotés, avec tri sur le
volet, dont l'objet est de savoir la couleur d'un garde boue homologué (obligatoire) ou l'amélioration
d'une piste cyclable européenne pour préparer le cyclo de demain à suivre la
discipline et les ordres...Ces réunions de présidents... de clubs
improbables... Ah la piste cyclable, le tunnel, la montre, surtout ne pas
penser...Quel avenir pour les cyclistes libres de demain..? Nos enfants.
Oui Rata tu étais une Marque... Une Marque déposée... Et
c'est à cette rando. de la... Marquerose (rien à voir avec la pédale) que j'y est pensé, début octobre, alors que tu étais tout
juste parti au ciel. Cette randonnée ou j'ai été je crois, quasi le seul, à
réaliser le parcours dans son intégralité... Tu n'étais pas là, ils ont tous "coupé"
tes amis cyclos et fini à 11h pétante du matin, presque
emmerdés avec ce fameux 70 bornes des "corps de lâche" au compteur...
Si tu avais été là ils auraient peut-être fait mieux..." Rata " , une vraie marque déposée à la FFCT dite de l'effondrement et des consensus mous (post Dobise)...
Tu aurais pu avoir du succès ailleurs. Un ailleurs plus magnifique, peut-être légèrement plus froid dans l'instantané, plus seul, mais plus vrai. L'essentiel. Tu aurais eu des velléités de
départ et de disparition comme moi... Mais non, il fallait rester dans
l'hexagone, bricoler à peine en une Espagne de "Perthus et d'embalses" avec le Guide Sieso, fossile
exhumés des bouleversements pyrénéens ou, extrême destination, en Italie du
nord, là où les peuples sont également très disciplinés, sans surprise (et que Manuella, la vraie Italienne, me pardonne)... Barrière
de la langue ? Ne jamais toucher aux euro diagonales de l'ami Gilbert qui s'est
mutiné très vite ? Appelé par son instinct d'aventure et de liberté croisé sur les grands fleuves sous des soleils exactement ?
En fait Rata, je n'ai jamais su qui tu étais. Ne m'en crois pas désolé. Je suis tranquille, c'est une constatation. Et ce texte ne m'aide pas et n'arrange rien à cet état. Je t'ai invité autrefois chez moi, je t'ai rendu visite,
je t'ai écrit , téléphoné souvent. La posture d'un vassal qui admire. J'avais fait ces efforts.
Tu n'es jamais allé vers moi.
Peut-être étais tu tellement lucide de ce que je viens d'écrire et de nos différences.
Mais comme on dit, on aurait pu faire un bout de route
ensemble depuis toutes ces années. Nous avions pas trop mal commencé en 1984, année de "Big Brother", une autre marque toujours active et d'actualité...
J'aurais d'ailleurs volontiers signé ton dernier carnet de route.
"Sariste" sur ta dernière diagonale...
"Sariste" sur ta dernière diagonale...
Je t'ai laissé seul, hors délai. C'est bien. C'est juste. Au revoir Rata. Si tu
m’écoutes de là haut.