PARIS -NICE d'avril- La belle descente vers la mer... (voyage d'itinérance - 993 km-1254 km total)

Aller vers le soleil... en course ou pas...


Mon premier Paris Nice date d’avril 1992, un parcours officiel de 945 km homologué par L’ACP (Audax Club Parisien), en temps limité, composé de 5 étapes. Disons 4 étapes et demi dont  une dernière légendaire de 240 km dans de mauvaises conditions qui a fait date pour un cycliste comme moi. Une arrivée après le gel, la grêle et la pluie, éclairée seulement par la lune, ayant convoqué mon physique et surtout le mental pour finir dans un train avant minuit. Une « course » contre moi-même vers le col de Vence avant de basculer pour retrouver la place Masséna et le dernier contrôle (fermé d’ailleurs) au café du Globe.
Un souvenir très physique donc de cette « descente  au soleil » avec 4 bivouacs épiques sur un parcours musclé (Morvan, Chartreuse, Route Napoléon, final au col de Vence via Geôlières).

Avril 2018 donc, 26 années ont passé et on ne sait comment d’ailleurs, ni pour qui ni pourquoi…, je vais « remonter le temps » et vérifier un peu ces vagues impressions (que je trouve trop précises donc fausses) qui me restent du premier passage. Paris Nice aussi, dans un autre registre,  pour les professionnels du vélo c’est un peu le début de saison, la première course à étape avec son cortège d’annulation, d’étapes épiques… Météo et condition physique aléatoires obligent…
Me voilà parti le 18 avril pour rallier Paris en TGV au milieu des grèves d’une France à l’arrêt. Moi, je serai en mouvement. Si les trains ne veulent pas rouler, le cycliste le fera. Et s’il n’y a plus de vélo, on ira à pied pour finir à la nage…  La météo sera excellente. Quelques anecdotes au milieu de cet espace-temps :


1) « La rencontre de Paris » :   Le 18 avril sorti du TGV (16h) je rejoins l’ile de la Cité et Notre Dame de Paris. Je veux que mon départ officiel soit donné ici plutôt qu’à la sortie de la gare de Lyon. C’est quand même plus « classe » et puis, j’aime Victor Hugo et sa prose (la poésie hum !). Loïc mon fils ne peut me recevoir ce soir  avec Juliette, sa femme. Il finit tard vers 21h. La rencontre serait éphémère et donc pas assez qualitative. Bivouaquer dans Paris hors de question.
Je préfère donc enchainer illico le parcours (hors ACP, je le fais « à blanc » cette année) en prenant les quais de Seine vers le sud. Cela ne va pas vite mais j’évite beaucoup les voitures et me promène dans ces banlieues il faut le dire, un peu « à la dérive »… Vers 18h30  je suis aux portes de Sénart et je trouve un message de Loïc qui dit que finalement je peux passer chez eux.
Que faire ? Moi qui suis déjà mentalement en 1992… « On ne va pas se louper deux fois ». C’est trop bête. Je décide de remonter par les grands axes et de virer à Vincennes, direction gare de l’est. 21h, je les retrouve dans leur petit appartement. Paris Nice attendra demain. Et c’est très bien.
Départ (fictif il faut préciser) avec Victor Hugo...
C'est mieux que la gare de Lyon... Non ?


" Salut les jeunes... Merci pour la quiche et le bivouac confortable..."









        2)      « La rencontre d’Auxerre »… (19 avril)

C’est au soir du premier jour, pas loin de 200 km depuis cette ruelle cité de la Chapelle où habite Loïc et Juliette. Du travail propre à maitriser Melun, saluer Napoléon à Montereau, à ne pas trop s’assoupir à Bussy le Repos… J’arrive le soir à Auxerre, ville de Bourgogne et il faut s’alimenter avant de trouver le bivouac (je dors à la belle vous le savez). Kebab et autres échoppes ont pris le pouvoir dans la ville. Pas facile de se poser à cette heure. J’opte pour un couscous dans un restaurent marocain, un peu de sels minéraux, des merguez, c’est plutôt sympa. Surtout que mon vélo est là sous mes yeux, surveillé par le patron, il ne finira donc pas « au bled »…Un couple est à côté de moi, très coincé me semble-t-il. Lui parcours sa tablette en n’adressant pas la parole à sa compagne. Elle mange sans le moindre bruit comme un petit oiseau…Très maniéré tous les deux. Au bout de 45 minutes, une heure, la femme m’apostrophe et m’explique avec aplomb qu’ils sont en tandem, montent de Séville à Amsterdam et surtout qu’ils ont un blog dont elle s’empresse de me noter l’adresse. Quelle contraste et violence … Lui, le méticuleux,  veut absolument me montrer les photos sur la tablette. Je décline l’invitation,  je suis un peu fatigué par les routes, les monuments et les prés à colchiques. Le marocain, qui lui, a le sens du commerce, fait semblant de s’intéresser à leur passage des Pyrénées en bus. Pourquoi ont-ils attendu une heure avant de me parler, moi qui suis habillé en cycliste ?  Je n’ai d’ailleurs pas eu le temps et le désir de leur dire que j’avais un blog moi aussi. Je crois en fait que cela ne les intéresse pas, on ne doit pas pratiquer le même vélo…J’ai eu les mêmes sensations lors des Pâques à médailles avec ces tandems fédéraux… Étranges ces hollandais. Je ne les ai jamais compris. Pourquoi ? On en reparlera à une autre occasion.
Le fameux tandem lourd dans les trains... Il lui manque l'électricité..
L'ancêtre du train ?


Une certaine joie fédérale Hollandaise qui ne laisse pas indifférent...
A bientôt pour Pâques à médailles.. ?





























     
3 )      Bivouac au sommet du Mt St Vincent,… (20 avril)

Le Mt St Vincent s’invite à moi alors que j’ai passé le Morvan sans me geler pour cette fois. Oublié ce bivouac (de 92) à Autun déplacé vers le bloc sanitaire, la pluie m’ayant réveillé vers 2 h du matin…Vézelay, ce petit Mt St Michel de Campagne m’a plu… Pas trop de pèlerins en guenilles cherchant rédemption et à s’alléger de la vie et de leurs écarts… J’ai cherché un encensoir comme à Santiago pour me souvenir de cette exercice de physique du bac où on calculait la période connaissant la longueur du fil et l’angle…La suite, ces bosses ou parfois un Bambi traverse de façon imprudente, je n’en ai pas souffert non plus. Etant décalé sur le parcours de la flèche, je n’ai pas trop idée où je vais m’allonger, seul le compteur me renseigne, le 200 km étant le signal qui autorise le repos. Et voilà que cette double centaine coïncide avec le Mt St Vincent. Trop génial… Je monte donc à la nuit vers cette bosse, lieu géodésique certainement comme le roc de Gachone et me dis que c’est écrit. Qu’est-il donc écrit ? Et bien que je n’ai jamais pu dormir au sommet de la cime de la Bonette et que le Mt St Vincent c’est un peu la cime de la Bonette… C’est différent et c’est bien. Et peu importe les 2 km de dénivelé en moins… demain matin c’est lever de soleil sur la table d’orientation.

Mt St Vincent au petit jour... Pour remplacer le bivouac jamais réalisé au sommet
de la Bonette...

Sommet Bonette...



























    4)      Regarder passer les trains mais pas comme les vaches… (21 avril)

Me voilà sortant de Cluny et ses concours hippiques à chercher la route touristique de Macon. Je stoppe pour attendre et  regarder le TGV passer. Parce qu’il y a 3 jours j’étais dans ce même train à regarder Cluny…C’est une façon pour moi d’apprécier le prodige de la vitesse. En fait et depuis toutes ces années, je ne fais que de la cinétique dans ma tête… même si c’est de la vitesse lente, je suis en déplacement permanent. Le tgv fait partie de cet imaginaire qui te déplace ailleurs comme un vélo…Après tout une étape de 300 bornes dans la journée, c’est quand même une heure de tgv rien qu’avec des mollets et quelques sucreries… !? On parle de la même chose… Il m’arrive souvent dans ces translations magnifiques dont je suis devenu une petit spécialiste, soyons modeste, de poser mon vélo et d’attendre qu’un tgv passe…Le sifflement, le bruissement me procure une joie irrésistible. J’ai presque envie de faire un petit signe au conducteur : «  Salut collègue… »



5)      La route Napoléon… (22 avril)

Magnifiques enfilades qui me font bientôt traverser un Grenoble apaisé. Une ville des dimanches matin avec sa piste cyclable vers le pont de Claix. Souvenirs d’un peloton de BRA (Brevet de Randonneur Alpin) avec des motards qui me doublent fictivement là, sur l’avenue à ma gauche. Un peu plus rapides, un peu plus jeunes aussi (1999)…  Grenoble-Gap c’est chaud,  c’est « mal plat » aussi. J’évite l’effrayante côte de Laffrey pour ignorer « la rencontre » et descendre sur la Mure… Les côtes de Corps sont inévitables pour éviter le Devoluy, le passage est à Bayard qui se mérite quand même. Paysages magnifiques enneigés sous un soleil nouveau… Que l’après-midi fut  courte finalement. 




6) " Un Mac Do surgissant de la nuit..."

J’ai coutume de dire que pour un raider vélo, le symbole jaune d’un Mac Do dans la nuit est un phare… Il apparaît brutalement au loin pour dire, tu vas te poser et « recharger la chaudière ». Il est salvateur. Service tard, immédiat, vélo visible, sucres à gogo… Ce logo on l’aime, on le guette, on l’espère… C’est certain, les bons sédentaires couchés, moralisateurs de « nuits debout » à scander des slogans d’une autre époque, amoureux du brassage et de l’immobilité mentale, adeptes de salades diététiques avec limaces,  ne vont pas aimer cette réflexion…




7)      Le fantôme de Patrick Plaine… (23 avril)

Ce matin, je me lève pour la dernière étape. Mon fantôme de 1992, se débat déjà sous la pluie au pied du col du « noyé… ». Un fantôme à respecter puisqu' il finira lui aussi à Nice le soir du 5ème jour… Bref, je suis joyeux et après le Mac Do efficace, voici le « Marie Blachère » pas moins opérationnel du matin. Du choix, du café, bref un vrai petit supermarché… Un barbu est là qui se réchauffe, il a le même visage que Patrick Plaine (Cyclotouriste professionnel ayant parcouru près de 1,5 million de km dans sa vie…) sur ses dernières années. Une allure de clodo certes. D’ailleurs c’est un clodo. C’est incroyable la ressemblance. C’est peut-être un hologramme… Je lui paie le café. Pour exorciser peut-être et prendre des garanties pour finir… Pas de doute c’est Patrick Plaine, il a le même parcours et ne sait pas trop où il habite aujourd’hui.

1
Mon clodo du matin avait ce même visage...
Celui de Patrick Plaine...

Plus de 1750000 km en fait...




8) "Le fameux raccourci du Chaffaut encore non optimisé..."

Pour éviter Digne dans une translation vers Barrême, point névralgique pour rallier Nice, il y a un petit raccourci que tous les cyclistes connaissent... Dans l'autre sens, il fonctionne aussi... Dès 1983 (Tour de Corse) avec mon ami Bruno Boury nous l'avion expérimenté...  Il est possible de l'optimiser encore en prenant la D8 coté sud de la Bléone via les Ragots. Cela évite d'être jeté sur ce faux plat National 85 encombré et très stressant. Et pourtant, après plusieurs passages (BRM 600 en 99, Diagonales etc...) je ne suis jamais arrivé à embrayer sur cette petite route. La vitesse, et/ou le " à quoi bon" m'ont toujours rejeté sur la Nationale. Cette année est la bonne, j'ai le temps. Mon double de 1992 descend Bayard sous le déluge et moi, je suis là, serein... Je passe le pont de la Bléone à Malijai puis prend à gauche le long de la rivière... Pas de bol, un pont me remet 500 m plus loin sur la 85... J'aurai dû faire demi tour et aller chercher cette D8. Je le regrette vraiment.

La Bléone que je ne maîtrise pas...
9) Un final fantastique...

Jusqu'au Logis du Pin, "ça ne rend pas trop", côtes, soleil, pins, Clues... Bref on pourrait presque regretter de ne pas avoir pris la bascule du col de Toutes Aures qui te fais "chauffer la plaque" le long du Var pour un écrasement sur l'aéroport de Nice. Et pourtant. Après c'est 30 bornes en altitude (1000 m), petit vent favorable, plat... La descente sur Gréolières et puis Vence dans les brumes maritimes. Je ne cherche pas la lune au milieu des volutes. 1992 c'est terminé. Actualisé.

Non, pas toujours...

Encore quelques hectomètres et j'aurai actualisé Paris Nice...










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