Le bonheur en Cévennes...? (01 mai - 223 Km)

Le bonheur en Cévennes... ?
Magnifiques petites routes où le cycliste est souvent seul... La montagne Cévenole embrasse les individualités.
Tout peloton y est broyé, irrémédiablement exclu...



5h15, j'allume ma frontale. Il fait doux, une belle fin de nuit. Cette année, je monte seul à "la grand messe" des Ruisseaux Cévenols. Beaucoup d'absents, de fatigués, de séparés, la vie disperse les cyclistes et tous les êtres humains.

1984!  petit frère, année de mon premier passage sur cette organisation qui m'a fait aimer cette date, ces lieux, ces départs. Des parcours démentiels sur des petits chemins à châtaignes,  et tout ça, sous la pluie,  la neige, la chaleur...Tout a été vécu là-bas, tout y est encore aujourd'hui possible. C'est la date, le Cévenol Day ("CiDi"), le premier... Il faut y être c'est tout.
Beaucoup de cyclistes ayant préféré le confort et la facilité, ont été ensuite rongés par le remord qu'engendre l'absence... Ils s'y passe des miracles aussi, la pluie à "grosses gouttes" à Montpellier et, ni une ni deux, un "soleil éclatant" sur les pentes de l'Aigoual. C'est un risque à prendre. C'est une date à risque. La vie est un risque. Laissons les comptables faire des calculs. La mer va s'ouvrir en deux, et ça, personne ne peut le prévoir.
Lignes droites, lignes blanches, 3 sangliers qui veulent me faire chalouper aux abords d'un "château du sud" (à définir), le très fameux Lancyre. La lune qui se lève à droite avec un peu de rouge...En face, sortie Corconne,  village des enfances heureuses, le Mont Bouquet, une belle ombre bleue comme une destination vers le nord.


Je suis rapidement à Anduze puis je prend la roue d'une "bestiasse" qui revient de l'arrière. Encore un qui, comme moi, aime "borner"...Il en reste.
La vallée Borgne au petit matin... Quel plaisir! Le vélo ne fait pas d'effort, il regarde l'eau et glisse. Même pas peur de ce tunnel qui se prend pour un col par ce vent des cimes qui le traverse... Vas pour la route des Marquaires, régulière, la destination de Florac, d'autres aventures. Hop !, par inadvertance, tu bascules sur le petit vicinal à droite...pour aller chercher des baraques où, l'hiver, on laisse les morts au grenier...



       C'est rude ici. Faut-il y vivre ? Qui vivait donc là ? De quoi vit-on ? Sont-ils heureux ? Faut-il souffrir ? S'aiment-ils ? Se mélangent-t-ils ? Ont-ils des secrets bien lourds à ne pas partager ?... Autant de questions qui te transportent et te font oublier la pente sur un vieux bitume vintage et abrasif, la fameuse rugosité Cévenole (sur l'échelle d'un Jean Valéro). Ici, le vitesse (ou Nombre de Raynaud, du cycliste "inventeur de la statique") n'existe pas puisque, depuis sortie St Jean, on a supprimé la variable temps.
Le ravito après 48 bornes, même seulement à 800 m (Le Pompidou) et bien il te fait plaisir. C'est que tu as beaucoup vécu ces 3 dernières heures.
On retrouve quelques anciens mais combien ont disparu...  On l'a dit Bernard, ne pas s'attacher au passé, c'est un réflexe de vieux. Juste l'examiner et sans douleur comme un technicien. Si possible.

RV au Pompidou...

Allez, ce n'est pas fini et pourtant quelques cyclistes plongent direct sur la vallée Française, ils "jettent l'éponge", c'est trop pentu, trop raide, inadapté et même étouffant aujourd'hui. Ils vont sangloter de cette trahison plus tard, c'est certain. Il faudra attendre un an pour la rémission de ce péché. S'ils reviennent...

Que signifie donc ce linéaire au milieu des sources et du vert qui tournicote pour un plateau entre quelques arbres pas loin de stèles de pestiférés, de maquisards ou que sais-je ?  
Du braquet là maintenant pour gagner du temps ? Mais il n'y a plus d'horloges. Les montres n'existent pas, c'est l'absence de temps Cévenol. Et regardes bien cet épervier qui vole ! Il est en mouvement mais ne bouge pas. Il est là pour quelque chose. Il est chez lui. Il nous parle si nos yeux ne sont pas fixés sur un GPS.

"Avant d'aller au lit manges tes châtaignes..." Oui, Merci maman, je ne proteste pas, promis...
Voilà St Jean du Gard à nouveau, en descente et c'est bien normal, on l'a pas volé.
On descend un peu du ciel, d'un ciel où coulent des sources, où la vie exulte sans compromis ni peur, un lieu qui te fais affronter les faiblesses (relatives) de ton corps et libère ton mental, te fais trouver ce qu'il y  a de meilleur en toi, les restes de l'énergie qui ont peut-être sauvé tes aïeuls autrefois.
Animations d'arrivée, où sont passés les poubelles de 1984 avec les canettes au frais ? Que sont devenus les bruits des gros pelotons bruyant et bariolés, ces chants parfois mièvres et spontanés ? Peut-être n'ont-ils jamais existé. C'était peut-être un rêve. Un désir Cévenol, un désir de lumière là-bas dans les montagnes. On avait tous rêvé de cette journée, d'une journée comme ça. On en rêve encore. C'est bien le présent qui nous intéresse et le futur aussi puisqu'on compte y passer quelques encore années... ☺
Vent d'Autan, je ne lutte pas, mon retour est calme, j'ai encore à vivre.
Le vent tu ne peux rien contre moi puisque je t'aime.
Autan en emporte les Cévennes (ouf! -17h10)... 





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